Salariée en télétravail travaillant depuis son domicile sur un ordinateur portable, illustrant l’indemnité d’occupation du domicile reconnue par la Cour de cassation – article BAPE sur le télétravail.

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Indemnité télétravail : une obligation pour l’occupation du domicile privé

Sommaire

Télétravail et jurisprudence 2024 : une avancée majeure pour les salariés

Le 21 mars 2024, la Cour de cassation a rendu un arrêt décisif en matière de télétravail. Elle reconnaît désormais qu’un salarié utilisant son domicile à des fins professionnelles peut réclamer une indemnité d’occupation, même si cette question n’était pas le cœur du litige initial.

Ce raisonnement repose sur un principe fondamental : l’usage du domicile privé constitue une immixtion dans la vie privée du salarié. Or, toute atteinte à la sphère personnelle doit donner lieu à une contrepartie financière.

Une nouvelle lecture des obligations de l’employeur

La Cour précise que cette indemnité est due lorsque :

  • Aucun local professionnel n’est mis à disposition ;
  • Ou que le télétravail est prévu contractuellement (contrat, avenant ou accord collectif).

« L’occupation du domicile du salarié à des fins professionnelles constitue une immixtion dans sa vie privée, de sorte qu’il peut prétendre à une indemnité à ce titre dès lors qu’un local professionnel n’est pas mis effectivement à sa disposition ou qu’il a été convenu que le travail s’effectue sous la forme du télétravail. »
— Cour de cassation, 21 mars 2024

Indemnité d’occupation en télétravail : vers un droit automatique

Cet arrêt bouleverse les pratiques. Jusque-là, seules certaines situations donnaient droit à indemnisation : clause spécifique dans le contrat, usage établi, ou justificatifs de frais (Internet, mobilier, chauffage…).

Ce n’est désormais plus nécessaire. Le simple usage du domicile dans le cadre professionnel suffit à faire naître ce droit. Il ne s’agit plus seulement d’un remboursement de frais, mais d’une compensation liée à la privatisation de l’espace personnel du salarié.

👉 Ce glissement élargit considérablement la notion de préjudice, en considérant l’impact du télétravail sur la vie privée comme une charge à compenser.

Obligations des entreprises : intégrer l’indemnité télétravail dans les pratiques RH

Les employeurs doivent désormais intégrer cette nouvelle donne dans leur gestion du télétravail. Cela implique :

  • Prévoir une indemnisation systématique, via un forfait, un barème ou une clause-type dans les contrats ;
  • Réviser les chartes et accords collectifs pour y intégrer explicitement ce droit ;
  • Anticiper les réclamations de salariés, y compris de manière rétroactive dans la limite légale ;
  • Évaluer les impacts financiers d’un télétravail partiel ou généralisé sur l’ensemble des effectifs.

     

📌 Tous les salariés sont concernés, qu’ils soient cadres ou non, dès lors qu’ils utilisent leur domicile à des fins professionnelles sans mise à disposition d’un espace adapté par l’entreprise.

Prescription de l’indemnité d’occupation : 2 ans pour agir

Autre élément clé : l’action du salarié pour réclamer cette indemnité est soumise à la prescription biennale prévue à l’article L.1471-1 du Code du travail.
Le salarié dispose de 2 ans à compter du jour où il a eu connaissance du non-versement (ou aurait dû en avoir connaissance).

💡 Cette prescription de 2 ans est souvent méconnue et plus courte que le délai de droit commun (5 ans) parfois invoqué à tort dans ce type de litige.

Récapitulatif : les 3 conséquences principales de la jurisprudence télétravail 2024

Situation

Conséquence pour l’employeur

Pas de local pro mis à disposition

Indemnité d’occupation obligatoire

Pas de clause dans le contrat ou l’accord

Le salarié peut réclamer une compensation

Action en justice tardive

Prescription réduite à 2 ans

 

Recommandations aux employeurs : comment prévenir les contentieux liés au télétravail

Face à cette évolution jurisprudentielle, il est essentiel d’agir rapidement. Voici les bonnes pratiques à adopter :

  • Mettre à jour les politiques internes : chartes télétravail, accords collectifs, notes de service…
  • Prévoir un forfait d’indemnisation clair (par exemple, un montant mensuel ou journalier)
  • Inclure des clauses types dans les nouveaux contrats et avenants
  • Former les équipes RH et managers pour sécuriser la mise en œuvre du télétravail
  • Conserver les preuves de mise à disposition de locaux, lorsque c’est le cas

     

🎯 En l’absence d’action, l’entreprise s’expose à un risque contentieux croissant… et parfaitement fondé juridiquement.

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